À droite de la scène, les 12 instrumentistes, menés par Patrick Leterme de son clavier et de son accordéon, à droite, discrète, une traductrice en langage des signes et au centre, un monceau de caisses de bois, à claire-voies, empilées. Venus calmement du fond, les enfants se plantent devant nous, le regard assuré, la mine sérieuse. Il y a des petits, des moyens et des grands… des tresses et des queues-de-cheval, des casquettes, des vêtements à la fois proches et lointains, avec un air de Tchéquie, sobres et pauvres (Héloïse Mathieu). En un temps record, chacun s’empare des caisses et les range : les voilà chaises, puis podiums, puis lits et encore mur avec fenêtres. Précis, rapides ! De vrais pros, ces mômes ! Un accessoire vestimentaire sorti on ne sait d’où suffit à identifier les personnages. Les solistes sortent ainsi du chœur… et y retournent.

Ils sont 16 (impossible de les citer tous !), retenus sur audition d’une centaine : les couleurs vocales s’harmonisent, les timbres sont beaux, et l’articulation comme on en rêve parfois chez les adultes. Et la plupart ont le sens du théâtre. Mis en scène, en sobriété efficace, par Vincent Goffin, Brundibar se conte le plus naturellement du monde, dans une forme chorale, une vitalité sérieuse, et sans nulle surcharge historique, proche sans doute de l’esprit de son écriture. L’œuvre de Krasa est une fable où les fenêtres et les animaux dialoguent et c’est aussi un conte moral où deux enfants cherchent comment récolter des sous pour payer le lait destiné à leur mère malade et chassent avec l’aide de tous le méchant Brundibar… Une œuvre qui dit l’entraide, la résistance, l’imagination, la lutte du bien contre le mal, écrite en 1938 pour des enfants, créée au camp de concentration de Terezin, dans ce camp vitrine et abominable leurre orchestré par les Nazis.

Une nouvelle fois, après la Mélodie du bonheur, Le magicien d’Oz…, Patrick Leterme exerce sa magie du théâtre musical. Il y a du génie (et beaucoup de travail) en cet homme, producteur et animateur à la radio, rassembleur de troupe et surtout formidable musicien tout terrain. Et l’on salue tous ses instrumentistes au travers d’une partition qui mêle des mélodies très simples à des écritures plus complexes, nourrie du folklore tchèque, qui caractérise par un rythme, une ritournelle chacun des protagonistes et donne au choeur une force plus compacte. Une musique accessible et prenante.

Ce spectacle créé à Flagey dans le cadre du Festival Musiq 3, se jouera presque partout en Wallonie, de Namur à Tournai, dès le 10/7. Ne le ratez pas et emmenez vos enfants.

www.festivaldewallonie.be, 081/73 37 81.