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UN SECOND HYMNE NATIONAL

... symbole de l'unité italienne. Nabucco raconte l'histoire biblique de l'exil juif à Babylone. Le souverain cruel Nabucco devient impliqué dans une lutte de pouvoir avec sa fille Abigaille, dans laquelle il sera finalement vaincu et les Juifs  pourront retrouver leur liberté. 

Le génie de Giuseppe Verdi réside dans la formidable tension dramatique qui tend ses opéras et l’irrésistible beauté de ses mélodies. Nabucco, narrant un célèbre épisode biblique, contient en son sein les revendications d’indépendance du peuple italien soumis depuis trop longtemps à la domination étrangère. Parmi les passions humaines exprimées par les superbes airs, se trouve un chœur sublime. Le peuple juif y chante la nostalgie de son pays. Va pensiero, mélodie simple et pure par excellence devient, dès la création, un symbole de l’unité du peuple italien. Aujourd'hui, ce second hymne national a franchi les frontières et exprime la douleur de toutes les oppressions.

Pour ce chef-d’œuvre qui déclencha une véritable ferveur à La Scala de Milan lors de sa création en 1841 et qui fera de Verdi le musicien le plus célèbre d’Italie, une double et prestigieuse distribution s’impose. Nous retrouverons le grand Leo Nucci qui partagera le rôle-titre avec Ionut Pascu. Abigaille sera incarnée par les deux sopranos Virginia Tola et Tatiana Melnychenko. A la direction musicale, nous retrouvons Paolo Arrivabeni pour qui ce spectacle revêtira une signification particulière puisque c’est le premier ouvrage qu’il ait dirigé à Liège.

 Nabucco est de retour dans une mise en scène de Stefano Mazzonis di Pralafera pour une nouvelle coproduction de l’Israeli Opera de Tel Aviv et de l'Opéra Royal de Wallonie-Liège.
 

Le destin  a frappé Verdi encore une fois, le 18 juin 1840: ce jour-là, sa tendre et douce Margherita est emportée par une encéphalite, à 26 ans, huit mois après le petit Icilio, deux ans après la jolie Virginia, leurs deux enfants.

Verdi est effondré, seul, au bord du suicide En panne d'inspiration, écrasé par les coups du destin - ses deux enfants puis sa femme meurent à quelques mois d'intervalle -, le compositeur est au bord du gouffre lorsqu'on lui confie le livret de ce qui va devenir... Nabucco.

C'est dans cet état d'abattement qu'il doit achever la composition de son opéra bouffe: on imagine aisément combien la verve comique est éloignée de son esprit. Il vient pourtant à bout de la partition, en homme scrupuleux envers ses engagements. Et, le 5 septembre 1840, la Scala crée cette deuxième œuvre de Verdi, Un giorno di regno, en présence du compositeur, tout de noir vêtu, le cœur brisé, l'esprit martyrisé. C'est un échec complet. L'opéra ne sera représenté qu'une seule fois, comme si son titre, Un giorno di regno, avait été prémonitoire.

L'hiver vient. Un soir de décembre, Verdi traverse comme un somnambule la grande place du Duomo de Milan. Machinalement, il essuie de la main sa courte barbe noire où le brouillard se fige en gouttes au goût de larmes. Soudain, il manque se heurter à un homme. C'est Merelli, le directeur de la Scala. Ecoutons leur dialogue.

Merelli  - Ah! Ça alors! Verdi!

Verdi  - Bonsoir, monsieur Merelli.

Merelli  - Comment allez-vous, mon cher Verdi?

Verdi  - Mal...

Merelli  - Mais non, mais non, il ne faut pas vous laisser abattre. Il faut réagir, il faut rebondir. Tous les compositeurs connaissent des fours, vous savez! C'est bien malheureux pour nous mais c'est comme ça. Mais (il sort de sa poche une liasse de feuillets) tenez, cet imbécile de Nicolaï vient de me refuser ce livret, un livret superbe pourtant...

Verdi  - Je ne composerai plus jamais!

Merelli  - Allons, ne dites pas cela! Lisez-moi ce manuscrit...

Verdi  - Non, vous dis-je, plus une note, plus jamais, rien.

Merelli  - Ne soyez pas borné, que diable! et lisez-le au moins, cela ne peut pas vous faire de mal!

Verdi  - C'est inutile, je ne veux plus composer. Plus jamais.

Merelli  - Eh bien, lisez-le au moins pour me donner votre avis sur ce livret.

Avec un geste de lassitude, Verdi fourre la liasse de feuillets dans sa poche et s'éloigne lentement.

De retour dans sa chambre grisâtre, Giuseppe jette le manuscrit sur la table et ses yeux tombent sur quelques vers au milieu des pages éparpillées: «Va, pensiero, sull'ali dorate...». Il a relu récemment ce passage de la Bible narrant les malheurs du peuple juif jeté dans l'esclavage et l'exil. Dans la froidure de la nuit, le sommeil ne vient pas. «Va, pensiero...» Il se relève, rallume sa bougie et lit, relit et relit encore le manuscrit... Au petit matin, il pose quelques notes sous un vers, en griffonne d'autres durant la journée ; un autre jour, il trace une phrase mélodique pour un chœur... et, un an plus tard, l'opéra est composé. Les épaules encore voûtées par le malheur, Verdi se fait recevoir à la Scala par Merelli, qui lit son opéra, s'enflamme, s'exclame, appelle sa chère Strepponi, à laquelle il décide de confier le rôle féminin principal. Car il va le créer, cet opéra, et au plus vite, au moment du Carnaval.

Durant les répétitions, tout le personnel de la Scala est comme électrisé, chacun perçoit que c'est un tournant de l'histoire de l'opéra qui se dessine. Seul Verdi demeure sombre, comme si l'intérieur de son corps était vidé. C'est tout de noir vêtu qu'il se rend, le 9 mars 1842, à la Scala. Et la soirée n'est qu'un long triomphe: Nabucco fait renaître Verdi, qui pleure de joie - de désespoir, aussi, en songeant à celle qui n'est plus là, la belle Margherita, à ses enfants qu'il a portés en terre. Et pourtant les bravos ne cessent pas. Il doit venir saluer sur scène et le fait gauchement. Mais ces acclamations sans fin commencent lentement à lui réchauffer le cœur.

Ce sera le même triomphe à la deuxième représentation. Puis aux suivantes. Prévu pour huit représentations, Nabucco en atteindra 57 en trois mois: record absolu, et inégalé, pour la Scala ! un événement unique dans l’histoire du théâtre milanais et franchit ensuite les Alpes : Vienne, Lisbonne, Berlin, Stuttgart, Paris, Londres et même Barcelone. «Ma carrière a vraiment commencé avec Nabucco», dira-t-il quelques années plus tard. Après le terrible fiasco d'Un jour de règne près de deux ans plus tôt, c'est un règne de près de soixante ans, jusqu'à sa mort en 1901, qui débute pour Verdi.

Le 9 mars 1842, Nabucco, le troisième opéra de Verdi, est présenté à la Scala de Milan, après seulement douze jours de répétitions. Donizetti est dans la salle. Malgré la période du carnaval – Verdi s’était montré intransigeant sur le choix de la date, voulant absolument éviter la période du carême vu le sujet –, la représentation rencontre un énorme succès. Et ce malgré les conditions vocales difficiles de Giuseppina Strepponi – elle deviendra sa deuxième femme dix-sept ans après cette malheureuse représentation – qui incarnait alors le rôle ardu d’Abigaille aux côtés du baryton donizettien Giorgio Ronconi dans le rôle du roi babylonien.

 

Aujourd’hui, Nabucco a presque la saveur d’une lutte épique entre la providence qui lui a donné à voir la page la plus célèbre de l’opéra et Verdi lui-même qui, lecteur de la Bible, mais également agnostique tourmenté, s’est retrouvé envahi par une espèce de « fureur sacrée ». C’est d’ailleurs précisément sur cette image du chant des esclaves qu’il a libéré toute sa puissance créative. Ce chœur solennel, triste, puis lumineux, Va Pensiero, est le onzième numéro de l’opéra et anticipe la prophétie de Zaccaria, avec laquelle se clôture le troisième acte. Non seulement un adieu à la liberté, mais également un adieu à la vie. Adieu à la liberté et à la vie qu’il faudrait toujours débarrasser de la rhétorique et de tout lien à des faits politiques italiens passés et contemporains – également au niveau des arrangements scéniques – et ramener à la saveur biblique, plus dense, universelle et grandiose, associée au début de la captivité de Babylone, une prière entonnée par tout le peuple, comme l’a très justement fait remarqué Rossini, qui l’a définie comme « une grande aria pour sopranos, contraltos, ténors et basses ». Qu’a donc vu cet artiste – jeune (il n’avait que vingt-huit ans à l’époque), mais déjà plein de charisme et d’une « simplicité fascinante » – dans ce peuple enchaîné chantant à la « patria belle e perduta » (belle patrie perdue) et priant pour que cette « patire » (souffrance) se transforme en « virtù » (vertu) ?

Le psaume 137 est le seul des 150 psaumes à évoquer l'exil à Babylone qui a suivi la prise de Jérusalem par le roi de Babylone Nabuchodonosor en 586 av. J.-C. Selon la tradition rabbinique, il a été écrit par le prophète Jérémie. En latin: Super flumina Babylonis.

DIRECTION MUSICALE : Paolo Arrivabeni 

 MISE EN SCÈNE : Stefano Mazzonis di Pralafera 

CHEF DES CHŒURS : Pierre Iodice 

ARTISTES : Leo NucciIonut PascuVirginia TolaTatiana Melnychenko,Orlin AnastassovEnrico IoriGiulio PelligraCristian MogosanNa’ama GoldmanRoger JoakimAnne Renouprez,Papuna Tchuradze 

9 DATES : Du mardi, 18/10/2016 au samedi, 29/10/2016 

http://www.operaliege.be/fr/activites/nabucco

Va, pensiero, sull’ali dorate;
Va, ti posa sui clivi, sui colli,
Ove olezzano tepide e molli
L'aure dolci del suolo natal!

Del Giordano le rive saluta,
Di Sionne le torri atterrate...
Oh mia patria sì bella e perduta!
Oh membranza sì cara e fatal!

Arpa d'or dei fatidici vati,
Perché muta dal salice pendi?
Le memorie nel petto raccendi,
Ci favella del tempo che fu!

O simile di Solima ai fati
Traggi un suono di crudo lamento,
O t'ispiri il Signore un concento
Che ne infonda al patire virtù!

Va, pensée, sur tes ailes dorées ;
Va, pose-toi sur les pentes, sur les collines,
Où embaument, tièdes et suaves,
Les douces brises du sol natal !

Salue les rives du Jourdain,
Les tours abattues de Sion ...
Oh ma patrie si belle et perdue !
Ô souvenir si cher et funeste !

Harpe d'or des devins fatidiques,
Pourquoi, muette, pends-tu au saule ?
Rallume les souvenirs dans le cœur,
Parle-nous du temps passé !

Semblable au destin de Solime
Joue le son d'une cruelle lamentation
Ou bien que le Seigneur t'inspire une harmonie
Qui nous donne le courage de supporter nos souffrances !

Sources

-(Extraits choisis de l’article de Luca Pellegrini dans le numéro spécial du magazine « L’Opéra » consacré, en septembre 2016, à l’Opéra Royal de Wallonie-Liège)

-Alain Duault

https://fr.wikipedia.org/wiki/Nabucco

https://www.opera-online.com/items/works/nabucco-solera-verdi-1842

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Commentaires

  • administrateur théâtres

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  • administrateur théâtres

    Vous avez toujours rêvé de découvrir l’envers du décor en assistant à la répétition d’un spectacle d’opéra ?
    Nous avons le plaisir de vous inviter à la répétition « scène-orchestre » de Nabucco, le jeudi 13 octobre à 19h.

    Cette répétition est une étape de travail importante dans l’élaboration d’un spectacle. C’est le moment où, pour la première fois, l’orchestre se joint aux chanteurs.
    Une belle occasion de surprendre les artistes dans l’effervescence d’une répétition où tout peut encore arriver !

    Et en plus... c’est entièrement gratuit !

    En participant à cette soirée inédite, vous aidez également l’Opéra car, en fin de répétition, vous participerez à un exercice d’évacuation incendie (procédure indispensable pour former nos équipes à vous accueillir dans des conditions optimales de sécurité et de confort)

    Venez nombreux !

    Sur réservation via info@operaliege.be (en indiquant votre nom et le nombre de places souhaité) ou par téléphone au +32 4 221 47 22

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  • administrateur théâtres

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