« Au théâtre, il n’y a rien à comprendre, mais tout à sentir. » Louis Jouvet
Dans cette Mamma Medea, au titre si innocent, nous assistons à un bombardement de sensations à vif et à un plongeon dans les enfers brûlants de la passion sauvage, de la barbarie élevée en mode de vie et des sentiments contradictoires portés à leur incandescence. Le théâtre du Rideau nous emmène dans une interprétation fulgurante des paroxysmes délirants du vieux mythe de la sauvage Médée, réénergisé par l’écriture bouillante de l’auteur flamand Tom Lanoye.
Une figure littéraire remarquée et estimée à travers toute l’Europe. Le génie du verbe y est, est-il un héritier de Hugo Claus ? La puissance évocatrice du texte est incomparable. Il y a une richesse verbale volcanique et une violence inégalée dans les souffrances des protagonistes qui captive l’attention. La traduction française est splendide. Le texte en langue originale, moins sauvage parce que silencieux, clignote comme à l’opéra. Une guitare et des chants multilingues constituent quelques pauses méditatives bienvenues. La musique n’adoucit-elle pas les mœurs ? La mise en scène est d’une liberté et d’une férocité incontestables. Tout est dans l’affect déversé sur le plateau comme le chaos de notre monde. Mais rien ne sert de décrire le spectacle en long et en large, il faut aller sentir de tout votre être, si vous osez, cette production théâtrale tout-à-fait hors du commun. La distribution est sans faille et chacun des personnages est à la fois grandiose, à l’échelle des dieux mythologiques, et dramatiquement vulnérable et humain. Down to earth.
L’histoire :
Nous sommes en Colchide chez le roi Aeétès, un tyran barbare. Jason et ses compagnons Argonautes sont venus récupérer la toison d’or gardée par un serpent aux mille yeux. Le héros grec doit d’abord subir une épreuve apparemment insurmontable, celle de dompter deux terrifiants taureaux aux pieds d’airain, de labourer un champ sacré consacré à Arès, semer dans ce champ les dents d’un dragon et tuer l’armée de guerrier géants qui en sortirait. Médée, la fille du roi et la nièce de Circé devient follement amoureuse de Jason et trahissant son père, aide Jason par ses conseils avisés. Le défi téméraire réussit à Jason mais le roi a juré de se venger et de l’exterminer avec ses compagnons. Médée endort le serpent gardien de la toison d’or par son chant magique et s’enfuit avec Jason vers Iolcos, en Thessalie. Elle lui fait tuer son propre frère Absyrtos lancé à sa poursuite par le roi de Colchide. Pour éloigner la malédiction qui les poursuivra après un acte si atroce, les deux amants n’hésitent pas à procéder à un rituel barbare sur les marches du temple d’Artémis. Après un séjour tumultueux à Iolcos où Médée se livre à toutes sortes de crimes par amour pour Jason, Jason finit par être chassé. Médée, Jason et leurs fils trouvent refuge à Corinthe auprès du roi Créon. Mais Médée sombre dans la folie, car Jason a décidé de la bannir et d’épouser Créuse, la fille du roi Créon. Répudiée, bafouée et désespérée, Médée assassine Créuse en lui tissant une robe assortie d’un diadème en or qui se transformeront en flammes au premier essayage. Le père périt dans les flammes en voulant sauver sa fille. Jason est fou de rage. Une querelle dévorante poussera Médée et Jason à assassiner leurs propres enfants.
La tragédie antique a été tordue et rendue à notre échelle actuelle. Elle secrète avec force la profonde douleur des déchirements intimes pour fabriquer une œuvre théâtrale vibrante et totalement bouleversante.
Du 11 au 29 octobre 2011
Avec : Anne-Claire, Claire Bodson, Adieb Drumel, Pierre Haezaert, Francesco Italiano, Philippe Jeusette, Nicolas Legrain, Mathilde Rault, Yannick Renier, Fabrice Rodriguez et les enfants Jules Brunet, Arthur De Waele, Tibo De Waele, Balthasar Monfè |
mise en scène Christophe Sermet Photos de : ©Marc Debelle |
dossier pédagogique: http://www.rideaudebruxelles.be/saison1112/mamma/files/DS_mamma.pdf
Lieu : Au Kriekelaar - Rideau de Bruxelles
86 rue Gallait 1030 Schaerbeek - 02 737 16 01
http://www.rideaudebruxelles.be/index.php
Commentaires
NOMINE MEILLEURE MISE EN SCENE (CHRISTOPHE SERMET) ET LAUREAT 2012 POUR CLAIRE BODSON, MEILLEURE ACTRICE.
www.rideaudebruxelles.be
Extrait de la critique de Christian Jade (RTBF): critique de 2011
" A ma connaissance, Mamma Medea n'a été jouée qu'une fois en flamand, il y a 10 ans, à Anvers. Donc, même pour les Flamands de Bruxelles, ce sera une découverte, ce texte de Tom Lanoye, dans une version française d'Alain Van Crugten- le traducteur réputé des vedettes flamandes, dont le fameux Chagrin des Belges d'Hugo Claus.
Au fait.
Mamma Medea joue sur plusieurs tableaux. Au centre, bien sûr, la figure tragique de Médée, l'infanticide, mais "retravaillée" et dans sa psychologie et dans sa relation avec sa famille "barbare" et dans son rapport au monde "civilisé", les Grecs, incarné par Jason. Cette première partie, "épique" est centrée sur l'épreuve imposée à Jason par le tyran, père de Médée, Aiétès- -pour conquérir la fameuse "Toison d'Or" et sur le coup de foudre de Médée pour le beau "civilisé. Dans la deuxième partie fabuleuse, le duo Jason /Médée nous plonge dans l’intimité d’un couple déchiré avec une interprétation superbe de Jason et gagne encore en intensité "
A voir au Théâtre National , hébergeant le Rideau de Bruxelles pour Mamma Medea jusqu’au 25 janvier 2014
http://www.rtbf.be/culture/chronique/archive_christian-jade?chroniq...
Le Rideau de Bruxelles a le plaisir d'annoncer la programmation de Mamma Medea au Théâtre de l'Odéon, dans le cadre du Festival Impatience, ces 9 & 10 mai.
Créé en octobre 2011 au Rideau de Bruxelles, nous pouvons d'ores et déjà annoncer quelques dates de tournée.
MAMMA MEDEA en tournée
TOM LANOYE / CHRISTOPHE SERMET (artiste associé au Rideau)
09 & 10.05 2012 ODÉON - Théâtre de l'Europe, Paris / Festival Impatience
Tournée prévue :
05.07 2012 Festival au Carré, Mons
10,11 & 12.10 2012 Comédie de Béthune, France
16, 17 & 18.10 2012 Théâtre royal de Namur
29 & 30.11 2012 Festival Next, Tournai
à lire, le bel article de Suzane Vanina : http://www.ruedutheatre.eu/article/1546/mamma-medea/