En cinéma, il y avait déjà La vie est belle de Frank Capra, habitué habitué du petit écran pendant les fêtes de Noël, pour se mettre dans l’ambiance et mettre son moral au diapason des guirlandes et autres chaussettes accrochées au manteau de la cheminée.
En théâtre, il y a désormais Le Noël de M. Scrooge , conte de Charles Dickens adapté par Thierry Debroux, pour s’envelopper dans cet esprit douillet, feel-good des festivités de fin d’année.
« Il faut bien redevenir enfants quelquefois, surtout à Noël », écrit Dickens dans sa fable. Et c’est justement cette mission – rendre à chacun son âme d’enfant – que se fixe le spectacle tendre et ludique mis en scène par Patrice Mincke, dans un décor aux infinis ressorts.
Comme il l’avait fait pour Le tour du monde en 80 jours , dans ce même Théâtre du Parc, Ronald Beurms imagine une scénographie pleine de surprises, qui se déplie ou se dérobe dans de miraculeuses métamorphoses.
Tout commence dans les rues de Londres, au XIXe siècle. Alors que, sous les flocons de neige, la ville s’apprête à célébrer le réveillon de Noël, l’ambiance est beaucoup moins festive dans la boutique d’Ebenezer Scrooge, riche marchand occupé à faire ses comptes. A la manière d’un gros plan cinématographique, le décor se déboîte alors pour faire coulisser l’officine de Scrooge jusqu’au centre du plateau. On y fait plus ample connaissance avec l’avare vieillard, insensible à la condition de son employé sous-payé, Bob Cratchit, ou aux sollicitations d’un bénévole venu collecter l’aumône pour les pauvres.
Nouvelle pirouette du décor : Londres pivote tout entier pour laisser place à son manoir délabré. Fervent défenseur de l’austérité, Scrooge préfère s’enfermer dans sa chambre mal chauffée plutôt que de participer aux démonstrations de joie et de partage en ce soir de Noël.
Un homme pourtant va venir déranger sa retraite spartiate. Sa hotte a beau ressembler à une sacoche pour coursier à vélo et son couvre-chef, tenir du bonnet d’aviateur en cuir rouge plutôt que du traditionnel bonnet de laine, on jurerait que c’est le Père Noël en personne qui vient visiter notre rabat-joie de Scrooge. Suspicions confirmées plus tard quand son traineau viendra fendre le ciel (ou presque) pour déposer un colis spécial en ville.
En de sportifs stratagèmes scénographiques – un cimetière qui surgit du sol, un pensionnat qui se transforme en parc, mille escamotages pour nous faire voyager dans le temps et l’espace – la pièce nous transporte dans le passé de Scrooge puis dans son futur, réveillant des souvenirs douloureux ou suscitant des regrets profonds, avant de lui ouvrir les yeux sur la sécheresse de son cœur. Tout est bien qui finit bien, on s’en doute, dans cette parabole sur la solidarité, fable moraliste traitée ici avec une fantaisie et un humour salvateurs.
Aussi facétieux dans l’avarice que dans la charité, Guy Pion compose un Scrooge d’enfer, épaulé par un Claude Semal savoureux de nonchalance et de drôlerie dans le rôle du gouailleur Père Noël.
Le reste de la distribution déploie la même gourmandise, dans un conte aux accents de comédie musicale qui n’en distille pas moins quelques allusions à une misère sociale qui n’a rien à envier au XIXe siècle. D’ailleurs, le Théâtre du Parc s’est engagé à consacrer un euro par place vendue à soutenir une association d’aide aux plus démunis. Esprit de Noël, quand tu nous tiens!
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