PETITE MERE
Couplet 1 : Petite mère se lève tôt
Elle part à l’usine
Tant de poèmes sur son dos
Et sa vie dégouline
Petite mère vieillit un peu
Elle dort au soleil
Ses hublots coulent quand il pleut
Ou quand elle a sommeil
Couplet 2 : Petite mère est sage et blanche
Ell’ voyage en rêvant
Son chant peut traverser les planches
Il joue comme un enfant
Petite mère romanichelle
Se cache entre les draps
Dès qu’un marin monte à l’échelle
Ell’ lui ouvre les bras
Refrain : Attends-moi j’arrive maman
J’ai trop laissé passer le temps
Est-ce que tu m’aimes un peu encore
Quand tu t’ennuies au fond du port ?
Couplet 3 : Petite mère est un bateau
L’océan la désire
Il l’emmènera sur son dos
Si çà lui fait plaisir
Petite mère laisse couler
Le canal sur ses reins
Quelqu’un est venu recoller
Ce grand corps presque humain
Refrain
Couplet 4 : Petite mère se lève tôt
Elle part à l’usine
Tant de poèmes sur son dos
Et sa vie dégouline
Petite mère a rajeuni
Elle n’a pas sommeil
Derrière le hublot je souris
Elle danse au soleil
Elle danse au soleil !
écrit à Montillot en 2013
CE SERAIT BIEN
Ce serait bien si je
Pouvais garder tout le vert,
Tout le vert de tes yeux.
Dans tes yeux, je vois la mer.
Il faudrait qu’un matin,
Comme l’océan qui dort,
Je te prenne la main
Quand nous arrivons au port.
Ce serait bien si l’on
Faisait une place au rêve.
Le temps semble moins long
A l’homme heureux qui se lève.
Il faudrait un amour
Doux comme le vent d’été,
Plein de chaleur et d’humour
Et tremblant de volupté.
Ce serait bien si je
Pouvais garder ta présence,
Cacher tout au fond de
Mon coeur notre différence.
Il faudrait un beau soir
Brûler notre enfance morte,
Ranger dans un tiroir
Les clés restées sur la porte.
Ce serait bien si l’on
Faisait des châteaux de sable,
Des vers de mirliton,
Des bêtises sous la table,
Des courses sur la plage,
Avec les cheveux défaits !
Il faudrait un voyage
Qui ne finisse jamais.
Ce serait bien si je
Pouvais garder tout le vert,
Ne pas oublier que
Le monde tourne à l’envers.
Il faudrait qu’un matin
D’été chaud comme la braise,
Je vienne dans ta main
Goûter la première fraise.
écrit en 1997 à Paris
ODE A LA LOIRE
J’ai trouvé la Loire
Comme elle était belle
J’ai trouvé la Loire
Sur un bateau blanc
Je l’aimais, c’est sûr
Mais je m’en vais loin d’elle
Je l’aime, c’est sûr
Jusqu’à la fin des temps
Je l’ai traversée
Avant le pont-canal
Ses rives ensablées
Ont tracé mon chenal
J’ai gardé la Loire
Elle m’était fidèle
J’ai gardé la Loire
Contre moi bien au chaud
Elle allait parfois
Loin du monde cruel
Elle passait parfois
Par-dessus mon bachot
Elle avait la peau douce
Et je dormais le soir
Entre elle et la grande ourse
Ma bonne vieille Loire
Dans un trou profond
Je suis tombé pour elle
Dans un trou profond
En faisant un faux pas
Tout près de l’écluse
Je pense à ses dentelles
Tout près de l’écluse
Je meurs entre ses bras
Le bois touchait les pierres
L’eau manquait ici-bas
Les marins étaient fiers
De mener ce combat
Je fais des voyages
Avec les hirondelles
Je fais des voyages
Mais pas le printemps
J’ai trouvé la Loire
Quand j’ai ouvert mes ailes
J’aimerai la Loire
Jusqu’à la fin des temps
Je l’aimais c’est sûr
Et je dors avec elle
Je dors avec elle
Jusqu’à la fin des temps
Je n’ai rien vécu
Mais cette histoire est belle
Je n’ai rien vécu
Car je suis maintenant
Trop loin de la Loire
Mais j’ai chanté pour elle
J’ai quitté la Loire
Car la Seine m’attend !
écrit en 2004 à Briare
VOUS LARGUEZ LES AMARRES
Vous larguez les amarres un matin du mois d’août.
J’attends votre passage avec tant de douceur.
Entre les deux écluses, un bateau devient fou ;
Couché sur le flanc droit, il a mal, il a peur.
Vous avez pris le nom d’un voilier, d’une femme.
Je balance le seau vers l’eau sale du port.
Il ne vous reste plus qu’à décorer votre âme:
La mienne est mise à nu, alors je reste au bord.
Vous mettez le contact et le monde endormi
Peut crever de mensonge et de sévérité.
J’imagine vos mains sur le cordage, amis,
Vous êtes loin mais vous ne m’avez pas quittée.
Vous êtes quelque part dans un coin de ma tête,
Braves marins d’eau douce ou fringuants capitaines,
Vous laissez dans ma joie l’empreinte de vos fêtes.
Je vais m’y réfugier quand le temps se déchaîne.
Vous êtes déjà là, je ne vous attends plus,
Vous accrochez vos rêves à mon arbre ravi.
Mon hélice a tremblé, mes cordes se sont tues :
En nous reconnaissant, nous inventons la vie.
J’ai largué les amarres un matin du mois d’août.
Vous me voyez passer avec tant de douceur.
En sortant de l’écluse, un bateau vient vers vous,
Il a pris le départ, il vous ouvre son coeur.
Commentaires
C'est très très beau, merci !