Lorsque des souvenirs lointains remontent à notre mémoire, c’est le plus souvent éventés, ou au contraire surchargés. Plus essentiels que la souvenance exacte de lieux, les mots dits, ou parfois, le visage de ceux qui ont croisé notre route, c’est l'émotion, la sensation qui a jailli en nous et qui, des années plus tard, revient baigner, ou hanter notre âme. Il arrive même que le souvenir de la sensation soit plus fort que la sensation elle-même.
Ci-dessous, les voix des poètes Philippe Jaccottet, Eric Piette et Roland ladrière...
" Le peu de souvenirs qui me restent de chaque époque de ma vie, et leur vague, me remplit d’étonnement. Ainsi, de cette chambre d’hôtel de la rue d’Odessa – la faible ampoule et le miroir au plafond, le fracas des trains- mais quoi d’autre ? On aura vécu comme en rêve".
"Parfum des fleurs : respirer un iris ou une rose est l’unique geste qui me reporte immédiatement, irrésistiblement, à l’enfance ; et non pas comme si je me rappelais un de ces instants, mais comme si j’y étais, le temps d’un éclair, transporté. Il est étrange que la présence d’un âge déjà lointain se soit attachée à ce qui est le plus frêle, le plus invisible, au souffle d’êtres aussi brefs ".
(Jaccottet, La Semaison, Carnets 1968-1979 et 1954-1967)
"Les plaies de l'enfance
au placard
de l'inachevé
lorsqu'avec toi
sous des draps
nous rejouons la même vie
elle nous saisit entiers
avant que reviennent
les plaies de l'inachevé"
(Eric Piette, L'impossible nudité, Le Taillis Pré, 2014)
"Une lueur inhabituelle,
le souvenir qu'on en garde.
On pense
à des années-lumière
de vide
qui s'éclaireraient toutes entières"
(Roland Ladrière, Inconnaissance éblouie, Editions De Corlevour, 2015)
Commentaires
La mémoire est une chose étrange et savante à la fois... puisque parfois une minute peut être plus dense que des années et illuminer notre vie!
Merci pour cet intéressant partage Martine
Amitiés
Jacqueline
Merci de ton partage, Martine ! Je rejoins ton ressenti ! Cordialement, Nicole