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12273226268?profile=originalNaissance de Vénus, 1863
Alexandre Cabanel (1823-1889)
(musée d’Orsay, Paris)

       Au commencement, si l’on en croit la Théogonie d’Hésiode, furent d’abord créés Chaos, Gæa (le Terre) et Eros (l’Amour, force primitive)…

Gæa engendra le Ciel, Ouranos, les montagnes, Ori, et la mer, Pontos.

Puis, avec un sens de la famille qui force le respect, Gæa s’unit à Ouranos et ils donnèrent ainsi naissance aux Titans, aux Cyclopes et aux Géants. Sacrée filiation.

      Ouranos était un dieu fort sourcilleux. Il craignait que ses enfants ne lui ravissent le pouvoir, aussi, afin de contrer leurs noirs desseins, les enferma-t-il dans le ventre de Gæa, devenue son épouse. Elle en prit ombrage et ourdit un plan avec son fils Cronos, le plus jeunes des Titans…

Alors qu’Ouranos gagnait sa couche, toujours prêt à honorer sa moitié, Cronos, s’approchant en tapinois, trancha net les parties viriles de son père dépité.

 

12273226862?profile=originalOuranos dépité, la lippe pendante...

Mais... c'est une fille... bah, appelons-la Aphrodite Ourania

(falaise proche de Pétra to Romiou, Paphos, Chypre)

 

Et le sang*1 s’épandit dans la mer…

 

12273227253?profile=originalVénus anadyomène

Jean Auguste Dominique Ingres (1780-1867)

(musée Condé, Chantilly)

 

De l’écume (aphros) se forma, d’où surgit Aphrodite Anadyomène (« sortie de la mer »). A Cythère précisément, une île grecque entre la Crète et le Péloponnèse, et, de là, portée par le doux Zéphyre, gagna Chypre, l’île d’Aphrodite.

 

12273226679?profile=originalPétra tou Romiou

« Le souffle du vent d’ouest l’a portée

De l’écume jaillissante et par-dessus la mer profonde

Jusqu’à Chypre, son île, aux rivages frangés de vagues. »,

Homère (VIIIe s. av. J.-C.)

 

Là, exactement, sur la plage d’Achni, à Pétra tou Romiou, le rocher d’Aphrodite, près de Paphos. Elle prit ainsi le nom de Kyprogéneia, « née à Chypre » (il est vrai qu’à Cythère, de mauvais esprits sans doute, la disent Kythéreia, née là-bas !).

« Tous furent émerveillés à la vue de Cythérée

Aux cheveux ceints de violettes. », id.

Dont elle n’avait ni la discrétion ni la pudeur, nous le verrons.

Et l’onde de choc se propagea…

 

12273227471?profile=originalVénus à Paphos (ca 1852)

Jean Auguste Dominique Ingres (1780-1867)

(musée d’Orsay, Paris)

 

Dire qu’elle était parfaite…

Que la colombe était son emblème.

 

12273227095?profile=originalAphrodite, « radieuse déesse dorée »,

ointe qu’elle fut d’huile immortelle à sa sortie de l’onde par les Charités.

Elle reprend ici le modèle créé par Praxitèle à Cnide,

qui vaut mieux que les vertus aphrodisiaques prêtées à la cantharide.

(marbre, 1er siècle av. J.-C., musée de Chypre, Nicosie)

Blanche comme l’écume, dure comme le marbre, aux proportions idéales, telle le nombre d’or. Un canon vous dis-je, la callipyge. Et ardente avec ça, voire impertinente, l’innocente !

 

12273228088?profile=originalAphrodite callipyge (« aux belles fesses »)

(marbre, début XIXe, d’après l’antique.  

Parc du château de Chantilly.

Original conservé au musée archéologique de Naples)

 

Dessous le nom de Vénus belle-fesse ;
Je ne sais pas à quelle intention ;

Mais c’eût été le temple de la Grèce

Pour qui j’eusse eu le plus de dévotion.

Que jamais l’art abstrait qui sévit maintenant

N’enlève à vos attraits ce volume étonnant.

(La Fontaine, pour les quatre premiers vers, Brassens pour les deux suivants. Nos deux poètes auraient, n’en doutons pas, apprécié ce partage)

 

Qui vous embarque pour ses fêtes galantes.

Laissez-vous donc emporter par ce tourbillon…

      Aphrodite, déesse de l’Amour, préside au bonheur et à la fidélité des couples… Pourtant, de son temps, la déesse de la Volupté, mit plus que de raison le feu au panthéon, multipliant les accrocs, déclenchant les passions.

      Elle se maria à Héphaïstos, maître du feu, patron des forgerons, difforme il est vrai, mais qui ne portait alors de cornes !

 12273227868?profile=originalNaissance de Vénus, 1879

William Bougereau (1825-1905)

(musée d’Orsay, Paris)

 

A Chypre même, elle recueillit Adonis bébé, qu’elle confia à Perséphone, reine des Enfers. Toutes deux s’enamourèrent du bel adolescent qu’il était devenu. Zeus intervint avant que l’orage ne gronde et ne devint tempête. Il demanda à sa fille Calliope, une des Muses inspiratrices des Arts et Lettres, de trancher le différend. La messagère partagea équitablement le temps entre les deux rivales, tout en laissant quatre mois l’an à la guise d’Adonis.

      D’une liaison avec Arès, dieu de la guerre et son propre beau-frère, Aphrodite eut quatre enfants, dont un petit Eros, enfant charmant certes, ailé et joufflu, mais archer maladroit ou facétieux, c’est selon. Et qu’il ne faut pas confondre avec le dieu primitif de l’Amour. Car il pouvait taper sur la mandoline, bambino !

       Ce qui n’empêchait pas Aphrodite d’être toujours éprise d’Adonis qui, pour se distraire, partit à la chasse. Arès, éternel tempérament orageux, de l’éphèbe envieux, se changea en sanglier et chargea mortellement l’impudent imprudent qui saigna abondamment. A tire-d’aile la déesse en détresse « sur son char traîné par des cygnes, s’élance dans les plaines éthérées. », Ovide. Elle « ne touchait pas encore au rivage de Chypre, mais elle reconnait de loin les gémissements d’Adonis mourant. » D’une flaque répandue elle fit éclore l’anémone, d’une goutte naquit l’adonide goutte-de-sang. Une épine au pied piqua la déesse et que croyez-vous qu’il advint ? une rose blanche pour la jolie maman se mua en rose rouge. Si ce n’est pas du charme, je rends les armes!

12273228289?profile=original

Vénus conduite par l’Amour auprès d’Adonis mort

Bertoja (Jacopo Zanguidi, dit ; 1544-1573)

(musée du Louvre, Paris)

Funeste destin et gros chagrin pour notre héroïne après ce coup de boutoir. Elle obtint de Perséphone qu’il revint la moitié de l’année au Royaume des vivants.

 

12273228856?profile=originalVénus et l’Amour

(Ecole française, XVIe s ; musée Condé, Chantilly)

 

De Poséidon (Neptune), qui préside aux profondeurs marines, et sacré « ébranleur de la terre », deux enfants naquirent, dont une fille, Rhodos, dont l’île de Rhodes tient son nom.

De Dionysos, né de la cuisse de Jupiter (Zeus), dieu de l’ivresse et de la transe - enfin elle le prétendit, il était en voyage… mais Adonis passait par là – elle accoucha de Priape, dieu de la fécondité, pas vraiment attirant mais au naturel si érectile…

Tandis que d’Hermès (Mercure), un dieu très leste et remuant, elle aurait eu Hermaphrodite, au caractère ambivalent hérité de ses parents.

      Et lorsqu’elle ne séduisait pas le tout Olympe, elle semait la zizanie dans les couples les plus unis !

Belle d’entre les belles. Les têtes tournaient, la jalousie rongeait les cœurs les plus endurcis…

 

12273228879?profile=originalAphrodite et Eros, dite Vénus Felix

Alors, heureuse ?

Epoque romaine impériale,

d’après l’Aphrodite de Cnide de Praxitèle

(musée Pio Clemento, Vatican)

 

      Au mariage de Pelée, roi d’Egine, et de Thétis, la splendide Néréide, Eris, la déesse de la discorde ne fut pas de la noce. Lors du repas, elle lança « à la plus belle » une pomme d’or cueillie au jardin des Hespérides. Héra, Athéna, Aphrodite se reconnurent dans l’invective. Chacune voulut donc, à juste titre, gouter à cette golden et la défendre de la convoitise des deux autres.

12273228676?profile=originalLe jugement de Pâris, 1562

Léonard Limosin (ca 1505-1576)

Email de Limoges ; d’après une gravure de Marc-Antoine Raimondi

exécutée d’après un tableau perdu de Raphaël.

(Musée national de la Renaissance, Ecouen)

Pâris, le petit berger, simple mortel, quoique fils de Priam, roi de Troie, à la demande de Zeus, dut trancher le différend. Aphrodite lui promit alors la Belle Hélène et, Pâris ainsi tenté élit Aphrodite évidemment. Pomme de discorde qui déclencha la guerre de Troie… Le ver était dans le fruit.

 

12273227695?profile=originalMars et Vénus

Paolo Caliari, dit Véronèse (1528-1588)

Taquin, Cupidon (Eros) badine avec un chien, symbole de fidélité, tandis que Mars (Arès) se désarme devant Vénus (Aphrodite) qui s’amuse d’une girouette. Au moulin elle batifole, au four Vulcain (Héphaïstos) forge sa vengeance.

(musée Condé, Chantilly)

      Couchée dans le foin, le Soleil fut témoin, selon Ovide, « du commerce adultère de Vénus et de Mars » et celui-ci livra « au fils de Junon (Vulcain-Héphaïstos) les infidélités et l’asile qui en est le théâtre. » Alerté, Vulcain les surprend « réunis dans la même couche ]…[ et les enchaîne au milieu de leurs embrasements. » Il fit alors entrer les dieux de l’Olympe ; à la vue de ce spectacle « les Immortels éclatèrent de rire, et cette aventure servit longtemps d’entretien à la céleste cour. »

Vulcain, à la demande expresse de Neptune, libère pourtant les amants de leurs liens. Ce qui ne suffit pas à calmer l’ire de la déesse.

« La déesse de Cythère tire de cette révélation une mémorable vengeance ; elle veut qu’à son tour celui qui a trahi ses mystérieux amours soit trahi dans des amours semblables. Que peuvent, ô fils d’Hypérion (le Soleil, que les Romains assimilèrent à Apollon), ta beauté, ta chaleur, et l’éclat de tes rayons ? » Elle frappe le Soleil d’un désir ardent pour Leucothoé, un feu irréfléchi. N’ayant plus d’yeux que pour cette vierge, il délaisse ses amours passés, Rhodos, Clyméné et Clytie.

Pour la séduire et l’abuser, il prend la forme de sa mère, Eurynome. Clytie, folle de jalousie, dénonce le subterfuge au père, Orchamus. Scandale dans la famille, ce dernier, implacable, fait enterrer sa fille vivante. Le Soleil, n’y pouvant mais, répand sur le corps de Leucothoé un nectar odorant. Et la Nymphe, trempée de l’essence divine, devint encens (boswellia).

Eplorée, Clytie se tourna vers le Soleil, changée en héliotrope (ou en tournesol*2 dans une version courante de la légende). Depuis elle suit éternellement sa course.

 

 

12273229253?profile=original

La métamorphose de Clytie en tournesol

Un… De… Troy… Soleil !

Jean-François de Troy (1679-1752)

(musée Bossuet, Meaux)

 

Honteuse malgré tout des conséquences de son effroyable courroux, Vénus partit se rafraîchir les idées dans sa retraite de Paphos, tandis que Mars battait la campagne en Thrace.

Ah l’Amour !

Et vous, sacrifierez-vous à son culte ?

A suivre…

 

Michel Lansardière (texte et photos)

*1 De ce sang primordial et de la divine semence naîtront également des Géants et les Erinyes (Furies), dont la charmante Mégère. Quelle engeance !

*2 Le tournesol, ou girasol ou soleil, de nos campagnes aurait été introduit en Europe par les conquistadors au XVIe siècle… alors que l’héliotrope d’Europe était répandu dans tout le bassin méditerranéen. L’héliotrope, ou jaspe sanguin, est aussi une variété de calcédoine verte mouchetée de rouge évoquant des taches de sang. Taches que l’on observera plus aisément en mouillant la pierre et en la tournant vers le soleil avant de la sculpter (« pierre des martyrs ») et de la polir. Tandis qu’en peinture l’héliotrope est une nuance de violet. Le girasol également est une variété d’opale ou de quartz chatoyants qui accrochent les rayons du soleil.

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