Il est curieux cet endroit où je repose. Les bord élevés ne me permettent pas d’en sortir et comme pour apaiser mon désir de m’enfuir un fil en jouxte les deux côtés avec des boules de couleur qui s’y baladent. De temps à autre un visage rieur se penche et les agite en comptant : un, deux, trois… Ca y est, j’y suis, on m’apprend à compter ! Comme je suis poli- déjà- je lui fais un grand sourire édenté et je m’agite de tout mes membres, emprisonné que je suis dans un linge mouillé et malodorant parfois. Je préférerais être nu et moins cloîtré qu’à attendre qu’on vienne me chatouiller ou chanter une chanson pour que j’arrête de pleurer sur ma condition. C’est vrai que je pleure mais comment exprimer le besoin d’être parmi les autres ? Et malheureusement si je compte jusqu’à trois je ne sais pas encore parler. A peine quelques areu, brr, gouzi, petit-petit… que je ne  peux encore classifier, identifier au sein de mes demandes et que l’on me susurre à longueur de temps pour me calmer ! Et puis j’entends sans arrêt papa, maman. Comme si ces deux personnes venaient me réclamer un dû quelconque. Un jour j’ai prononcé l’un des deux noms alors ce fut la fête pour l’un et la tristesse pour l’autre. Je m’étais sûrement trompé de personne alors j’ai rattrapé mon erreur et j’ai prononcé l’autre dans la foulée. Et l’autre s’est mis à chanter aussi. Ouf ! je venais de comprendre qu’il ne fallait pas faire de jaloux surtout quand on est aimé par plusieurs.
                                                                          Ce que je préfère c’est le bain, ça sent bon et je peux enfin jouer comme j’ai envie. Il y a des canards tout autour, je leur frappe dessus, j’éclabousse partout et cela  fait rire. Alors je continue ; mais subitement on me demande d’arrêter car cela ne fait plus rire. Je trouve bizarre qu’on ait de la compassion pour des canards en plastique car je découvrirai plus tard qu’on en a moins quand ils sont vivants ! Pour l’instant je répète à qui veut l’entendre les mêmes mots à longueur de journée et je cherche à m’évader de mon lit aux bords hauts en me tenant sur mes jambes. Ma progression est rapide. Me voilà devenu un petit homme. Ce doit être important car mes deux papa-maman frappent dans leurs mains ! J’ai compris, pour être applaudi il faut marcher !