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Bredi-Breda, elle jeta ses vêtements dans la valise noire ouverte sur son lit.

 

"Quelle navrance !" se dit-elle en contemplant le spectacle de sa lingerie roulée en boule et de ses chemisiers froissés. "Tant pis...pas le temps de les plier" pensa-t-elle, et elle referma précipitamment son bagage.

 

C'était une bachelette de 17 printemps, un peu fafelue et aliciante. Une gamine des faubourgs coquette et coquine, plus tout à fait fille, pas tout à fait femme. Elle ouvrit la vieille fenêtre branlante de la chambre et fut saisie par un vent froidureux qui la fit frissonner. En hâte, elle jeta un châle laineux sur ses épaules, emporta la valise et commença à enjamber coulamment le rebord de fenêtre.

De la corniche elle apercevait la cour, deux étages plus bas et, en arrière fond, la tortouillade multicolore du jardin de Hubert Mantaupan. Elle cracha par terre avec mépris et éructa : "Ce bélitre de Montaupan et sa guenuche de femme, ils vont voir ce qu'ils vont voir...Prépare-toi mon gros maroufle, à mon tour de m'ébaubir !".

Elle se glissa prudemment jusqu'à la gouttière qu'elle enserra entre ses cuisses et retrouva instinctivement des gestes de gymnaste. Sans bourrasquer, elle se retrouva aisément sur le plancher des vaches et courut vers le jardin qui n'était plus maintenant qu'à quelques mètres.

A rémotis, près du saule pleureur, se trouvait la véranda où le couple de bourgeois prenait habituellement son dîner.

Prestement, elle se glissa derrière un massif de rhododendrons pour mieux observer la scène et entendit : "Marie-Louise ! Marie-Louise ! ? Mais où donc est passé cette clampine ? Ah ! Hubert, mais pourquoi donc avoir choisi cette bonne ? Elle n'est jamais là quand on a besoin d'elle !".

L'Hubert en question safrait un boeuf en daube et n'écoutait pas sa moitié, dont il considérait de toutes façons qu'elle ne débitait que des billevesées.

 

"Ah les cochons, non mais regarde moi ce bélître !" songea Marie-Louise en observant l'homme.

C'est le moment que choisit Marie-Louise pour faire une brutale apparition.

De surprise, l'homme en lâcha sa fourchette, tandis que son épouse le regardait en échapade.

"Finis de me jobarder les paltoquets : quand donc recevrais-je mes gages ?!  Voilà 6 mois que j'avale vos salmigondis, mais toujours pas la moindre piécette...".

Hubert s'en étrangla le gosier. Comment voilà cette donzelle, cette moins que rien, en train de causailler devant eux comme si elle était la maîtresse de séant ! Il faillit cette fois mourir tout çà fait étouffé, quand il vit la demoisselle remonter prestement ses jupons, se retourner et leur montrer ses fesses blanches en criant : "Allez les grenus, ça fait longtemps que je ne vous vois plus. Vous avez le bonjour de Marie-Louise !".

 

Et tandis que l'épouse affolée ranimait le coquin, Marie-Louise, à la venvole, s'enfuit prestement vers les fourrés où elle disparut.

On ne le revit jamais, mais sa remembrance resta longtemps dans la maison...

 

 

Sylviane Kaena,

Avec l'aimable concours du dictionnaire des mots disparus de la langue française.

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