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Le souci JGobert

Un soir, il me chasse de la maison. Il ferme les portes derrière moi. Je ne sais plus entrer dans ce qui est toujours mon chez moi, mon chez lui.

Je ne comprends pas de suite les raisons profondes de ce geste. Je reste dehors sans bouger, sans réaction. J'ai beaucoup de peine. Quand je pense à lui qui a toujours été un compagnon charmant, agréable, je n’arrive pas à déchiffrer ses raisons. Les souvenirs de notre vie ensemble, facile, confortable, heureuse m'échappent.
Il y a peu de temps, je me suis rendu compte que certaines dispositions changeaient autour de moi, surtout le jour où lui et sa nouvelle compagne ont ramené un grand panier en osier à la maison avec beaucoup de délicatesse.
Moi, un peu innocent, comme à chaque retour de mon ami, j'étais heureux, joyeux et je débordais de bonheur, de tendresse. Je sautais, je trépignais, j'étais content. 

D'un geste brusque, il m'a ordonné de rester tranquille.  Sa voix s’est transformée, inamicale et menaçante. Je suis resté proscrit sur le carrelage et ensuite dans mon fauteuil.
Les habitudes se sont vite modifiées et au fil du temps, les bruits également. Des cris, des pleurs m'éveillent et me sortent de mes rêves. Mes nuits sont entre coupées d'allées et venues qui me fatiguent.
Sa compagne, qui m'ignore depuis son arrivée, s'occupe de ce souci qui pleure constamment. Elle le nourrit régulièrement et n'arrive pas à l'apaiser.
A plusieurs reprises, curieux, j'essaye d'aller voir ce qu’il y a dans ce panier mystérieux. A chaque tentative, il me chasse.  Mon ami de toujours change beaucoup et me considère comme une menace. Je suis triste de perdre sa confiance, son amitié. Il m’abandonne et je suis parfois très en colère. Je m'en prends à ses vêtements, ses chaussures, son cartable que j’abime. Je suis irrité. Lui aussi se fâche et crie de plus en plus fort quand je fais une bêtise.
Couché la tête sur le sol, je ne comprends rien à ce qui se passe. 

Enfin, un soir, le petit souci apparaît avec un joli minois. J'ai le droit de le voir de loin, de ne pas approcher. A force d'être repoussé, refoulé, j'ai fait une tentative en force et j'ai fini par le bousculer et le faire tomber. Le souci a crié, pleuré tellement fort que j'ai voulu le réconforter avec un gros baiser. C'est à ce moment qu'il est arrivé, furieux. Il m'a frappé et jeté dehors pour la première fois.    

Depuis ce jour maudit, je suis privé de chaleur. Au début, j’étais enfermé dans le garage, Mes pleurs n'ont pas eu de prise sur lui. Il m'abandonne doucement, se détache de moi insensiblement. J'ai beau lui faire des yeux tristes, me rouler à ses pieds. Rien n'y fait. Il est intraitable.

Et puis, il y a eu le jour où n'y tenant plus, j'ai enfoncé la porte pour les voir, pour revivre avec eux dans cette maison qui m'est cher, habituel, agréable.

Sa compagne a hurlé, emporté le souci avec elle et prononcé des mots cruels. C'est elle ou moi...

A son retour, j'ai vu son regard se figer, se glacer. Son visage prendre une forme que je ne connaissais pas à ce jour. Sa voix est devenue très grave, sans appel, sans hésitation.  Je n'ai fait aucun mouvement, ni de joie, ni de peur. Je suis resté immobile à attendre le jugement. J'avais tort et j'en étais conscient. La sentence de mon amour pour lui ne peut me sauver. Il n'a pas cherché d'excuses et les mots sont tombés tels des coups de mort. Dehors. Dehors. 


Depuis, je suis l’intrus de cette maison. J'ai droit à regarder par la fenêtre le bonheur qui m’échappe, l'endroit où je vivais heureux dans le passé. Il me nourrit rapidement et ne m'adresse plus de regards. Ses yeux se détournent de moi quand j’approche. J'ai depuis quelques jours un abri dehors peu agréable. Je m'y couche, j’attends triste et désespéré. Mes rêves s'envolent toujours vers lui, mon ami. Je me dis que dès que le bébé sera grand, je pourrai revenir près de mon maître et ranimer avec lui les bons moments d'antan.

 
Ce matin, il fait très froid, j'ai les membres endoloris. Je viens d’entendre une camionnette s'arrêter devant la maison. Des voix inconnues se dirigent vers moi. J'ai peur tout à coup. Un homme vient et m'attache avec un regard plein de sollicitude. L’'autre me parle d’une voix douce. Viens, n'aie pas peur me dit le plus âgé. On va s'occuper de toi. Mon sang se fige.

Et puis, je monte tristement sans résister dans ce véhicule. Je n’y crois pas encore. Je sais qu'ils sont là, derrière le rideau. Ils ne se montrent pas.

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Commentaires

  • Bonjour Claudine. merci pour ton commentaire. Au plaisir de te lire.

    Bisous

    Josette

  • Bonjour Josette.

    Empathie, sympathie et Amour sont très présents dans ton texte.

    Tu as su pénétrer l'âme des animaux rejetés.

    Bisous,  Claudine.

  • Merci Sandra pour ce commentaire.

    Josette

  • Une vérité qui a du mal à s’installer dans l’esprit de certains. Mais comme pour d’autres sévices, il faut toujours en parler et ne pas rester indifférent à la moindre misère. Dénoncer encore et encore.


    Merci pour le commentaire Jacqueline.


    Amicalement


    Josette

  • Bonjour Rolande,


    L’être humain est toujours une énigme. Que ce soit les animaux que l’on abandonne, les femmes que l’on bat ou les meurtres gratuits. Il est difficile de comprendre et mettre des noms sur les faits. Cruautés, assassinats. Toujours la violence à portée de main.  


    Il est loin de nous le paradis des poètes et surement pas sur cette terre.


    Excellent journée bien protégée du froid et la pluie.


    Amitiés Josette

  • Le sort de beaucoup d’animaux de compagnie qui, dès qu’il y a un problème, sont rejetés abandonnés.


    Merci Adyne pour ton commentaire


    Amitiés Josette

  • Pour ceux qui comme moi aiment tous les animaux et vivent avec au quotidien, ces situations font toujours mal, quand ???? l'être humain se rendra t'il compte qu'un animal n'est pas un jouet de l'instant mais un être vivant avec un cerveau capable de mal être et de sentiments et qu'il s'éduque à toutes les situations...  Jacqueline

  • Une histoire ultra émouvante qu'il me semble connaître ....

    Avant de prendre un animal chez soi, il faut bien réfléchir. Combien de chiens errants avons-nous rencontrés au cours de nos nombreux déplacements ? Abandonnés par leur maîtres sur des routes inconnues ?Beaucoup trop hélas. Nous étions à chaque fois très affectés par tant de cruauté .... Qui étaient-ils ces inconscients ?

    Des gens comme tout le monde sans aucun doute. Gentils et tout et tout .... Comme nous en rencontrons des centaines. Etres humains qui êtes-vous réellement ????

    Il nous est arrivés souvent de nous poser cette question.

    Bonne soirée Chère Josette et mille amitiés. Rolande.

  • Triste !!!Très triste!!

    Merci Josette pour ce récit

    Amitiés

    Adyne

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