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administrateur théâtres

 « Les Inspirés », trois dieux chinois débarquent dans la capitale du Se-Tchouan au centre de la Chine, un confluent de pauvreté. Ils ont parié qu'ils ne trouveraient pas «une bonne âme» au moins en ce bas monde et considèrent l’humanité entière comme pervertie.  Rejetés par tous les villageois mais guidés par Wang, le porteur d’eau (ou de parole, comme vous voudrez) , ils acceptent l’hospitalité de Shen-Té la prostituée  locale. Pour la remercier, ils lui laissent une cassette avec laquelle elle rachète un débit de tabac puisqu'elle peut enfin choisir sa vie. Hélas la boutique de Shen-Té attire immédiatement les vautours : des plus démunis  aux plus nantis qui n’ont qu’un but,  lui soutirer ses biens. Empêtrée dans d’insurmontables contradictions Shen-Té va osciller entre le désir de faire le Bien et la Nécessité de « sauver son frêle esquif du naufrage ». Elle croit avoir entretemps rencontré l’Amour  mais c’est un méprisable individu, irresponsable, égocentrique et jouisseur qui veut la parasiter. Comment concilier son idéal d’amour et sa survie pure et simple ? Pour se tirer d’affaire, Shen Té se fait passer pour un prétendu cousin, Shui Ta, excellent et redoutable homme d'affaires qu'elle incarne elle-même et de plus en plus souvent. A moins que la Vie ne se charge de changer sa vie... La conclusion de Bertold Brecht est qu’il faut changer le monde et non une personne individuelle si on veut que le bonheur soit accessible.

12273048473?profile=originalCette pièce nous touche particulièrement dans le contexte de crise que nous traversons  qui laisse tant de  familles démunies et tant  de jeunes, diplômés ou non, déçus par le monde, ou par la vie? Les Baladins du Miroir s’en sont emparés comme le Théâtre de la Vie, il y a quelques années déjà, en 98-99?

Bouger, il faut bouger ! C’est ce que démontre une mise en scène virevoltante qui nous propulse et au cœur de l’Asie et au cœur des années 30. Un tintamarre de sabots de bois, de bicyclettes, de chariots, de thé ou de grains de riz  que l’on verse, de casseroles et de brocs, un incessant carillon de porte ne peuvent qu’éveiller l’attention du spectateur. Vous y ajoutez une vie de rue en live, des courses effrénées, des ballots que l’on balance d’une passerelle suspendue, des bruits de boulier compteur chinois. La Vie appelle! Le monde doit bouger!

Des lumières domestiques en tout genre, y compris les fameuses lanternes rouges,  fusent pour éclairer la nuit humaine. Mais qui y verra enfin clair? Les artistes se mêlent au public pour offrir le kroupouk ou des bribes mystérieuses de répliques, le spectateur bougera-t-il?  Le pétillement  de cette méditation sur la société ne manquera pas d’inquiéter les uns ou les autres. L’enthousiasme perceptible et le  talent des artistes est d'ailleurs un gage de réussite… L’action se porte partout dans le chapiteau et ne peut que réveiller des esprits  parfois engourdis par  un certain  confort, mais  certes pas celui des gradins... Cela fait partie du jeu.

01.la-bonne-ame-du-se-tchouan01.jpg © Jean-Pierre Estournet

C’est Beau, c’est Brecht, c’est Bien. C’est partout autour de vous et on l’espère en vous… Une fable épique tendre et réaliste, poétique et moqueuse, fine et saltimbanque en diable. On ne peut décidément pas rester indifférent devant un tel festin d'imaginaire, une  telle union de talents si multiples et réglés dans une telle modestie. Tout y est: la comédie, les instruments de musique, les chants, les personnages burlesques (la riche et hautaine propriétaire, le menuisier, le policier, le neveu, le chômeur-quémandeur, la famille du gamin-voleur...). Et un tribunal imaginaire.  Bref une vingtaine de rôles pour une dizaine de comédiens qui  ne cessent de se transformer. Se transformer, c'est bouger, non? Ou bien le contraire?  CQFD 

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Il reste à nommer toute la troupe, ensemble et séparément : les Baladins du Miroir avec Andreas Christou, Stéphanie Coppe, Abdel El Asri, Monique Gelders, Aurélie Goudaer, François Houart, Geneviève Knoops, Gaspar Leclere, Diego Lopez-Saez, David Matarasso, Virginie Pierre, les enfants de la compagnie  et tout un équipage de splendides marionnettes, nos miroirs inspirés ?

Une citation pour finir?

Fallait-il quelqu’un d’autre ou bien un monde autre

Ou alors d’autres dieux, ou pas de dieux du tout ?

Devant ce désarroi le seul secours serait

Et vite et tout de suite que vous réfléchissiez

À la meilleure manière, au moyen le plus fin

De mener une bonne âme vers une bonne fin

Cherche donc, cher public, la fin qui fait défaut

Car il faut qu’elle existe. Il le faut ! Il le faut !

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http://www.atjv.be/La-Bonne-Ame-du-Se-Tchouan

  • Mise en scène : François Houart et Gaspar Leclère
  • Composition et direction musicale : Line Adam
  • Lutherie sauvage : Max Vandervorst
  • Création costumes : Sylvie Van Loo assistée de Anne Bariaux, Virginie Gossuin, Marie Nils, France Lamboray et Nicole Mornard
  • Scénographie : Aline Claus et Isis Hauben assistées de Sylviane Besson, Eloïse Damien et Catherine Van Assche
  • Construction des décors : Xavier Decoux assisté de Bernard Antoine, Adrien Dotremont, et Ananda Murinni
  • Création lumières : Mathieu Houart
  • Régie : Ananda Murinni
  • Régie Plateau : Adrien Dotremont
  • Conception des marionnettes : Johan Dils et Sylvie Van Loo
  • Conseiller maquillages : Serge Bellot
  • Pyrotechnie : Nicole Eeckhout
  • Assistante à la mise en scène : Hélène Van Den Broucke
  • Création affiche : France Everard

http://www.lesbaladinsdumiroir.be/index.php/spectacles-a-l-affiche/la-bonne-ame-du-se-tchouan

note d'intention: http://www.lesbaladinsdumiroir.be/templates/joomlabaladins/html/bonneame/bast_note_intention.pdf

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Commentaires

  • administrateur théâtres

    Bonnes Gens de Ath, hâtez-vous! 28,29,30avril 2016!

  • administrateur théâtres

    Dépouillement des décors, polyvalence des comédiens! Du beau théâtre forain, sûrement pas foireux! http://www.rtbf.be/auvio/detail_l-invitation?id=2102265

  • administrateur théâtres

    Merci à Robert Paul pour ce bel article!

    Les Ecrits éclairés de Bertolt Brecht sur le Théâtre

    A voir sur le Réseau des Arts et Lettres en Belgique francophone, groupe théâtre à l'adresse:
    https://artsrtlettres.ning.com/group/groupethtre


    Bertolt Brecht a laissé une quantité considérable de manuscrits inachevés, d'ébauches et d'essais, dont le classement méthodique réclame le plus grand soin. On sait l'influence considérable exercée sur le théâtre contemporain aussi bien par l'enseignement de Brecht au "Berliner Ensemble" que par ses principaux écrits théoriques: "Cinq difficultés que l'on rencontre en écrivant la vérité" (1935), "Petit Organon pour le théâtre" (1949), "Réflexions sur les pièces populaires" (1950), "La scène de la rue" (1950), "Une nouvelle technique de jeu du comédien (1952), et "La dialectique au théâtre" (1955).
    C'est l' exil qui, en le privant durant quatorze ans de toute possibilité de travail concret, incita Brecht à fixer le souvenir de ses expériences de naguère, en éliminant l'accessoire et en insistant sur ce que le recul et l' isolement lui font voir comme essentiel. Le théâtre épique, qui avait été jusque-là exclusivement un instrument de lutte, doit, pour se mesurer avec d'autres formes dramatiques, se trouver des fondements esthétiques valables, sans rien perdre de ses vertus combatives. Les théories de Brecht visent toutes à fournir une méthode d'action. Il a analysé, modernisé, et naturellement dépassé les règles des Lessing, Schiller, Diderot et Piscator dont il s'est inspiré. Il a été également influencé par le mouvement de la "Nouvelle Objectivité" (Neue Sachlichkeit) qui connut un bref essor dans les années 1920. D'autre part Brecht esquisse dès "L'Opéra de quat'sous" la technique du théâtre épique.

    En 1935, dans un manifeste clandestin adressé aux intellectuels allemands, il dénonce la technique du mensonge fasciste. Il donne aussi les armes pour le combattre; ce sont les "Cinq difficultés que l'on rencontre en écrivant la vérité", et les conséquences sociales que Brecht en dégage sont inexorables. Les bons ne sont jamais vaincus à cause de leur bonté, mais à cause de leur faiblesse. A certaines conditions, la vertu peut vaincre. La vérité brechtienne est à la fois subjective et objective. Elle est inscrite dans les faits et l'acteur l'y inscrit. Elle doit traduire très exactement le rapport dialectique du spectateur au monde, et ne vise qu'un but: permettre à l'homme de manier, diriger, dominer le monde.

    En 1949, c'est le "Petit Organon", l'ouvrage capital dans lequel Brecht écrit: "Si nous donnons à nos personnages des moteurs sociaux, variables suivant les époques, nous empêchons dans une certaine mesure le spectateur de s'identifier avec eux_ le style théâtral susceptible de créer de telles présentations repose sur "l'effet de distanciation" ou "effet V" (Verfremdungseffekt). Le théâtre antique, le théâtre médiéval "distanciaient" leurs personnages grâce à des masques. Le théâtre asiatique utilise aujourd'hui encore des effets V par la musique et la pantomime. Mais ces effets reposent sur une base de suggestion hypnotique; leurs buts sociaux diffèrent totalement des nôtres. Cette technique permet au théâtre de mettre en oeuvre, pour élaborer ses images, la méthode de la nouvelle science de la société: la dialectique matérialiste_ Pour elle, rien n'existe qu'en transformation, donc en désunion avec soi-même. Cela vaut aussi pour les sentiments, les opinions et les attitudes des hommes par lesquels s'expriment les caractères spécifiques de la vie sociale". L'effet V n'est donc pas seulement, comme on l'a dit, un procédé de mise en scène en réaction contre de vieilles habitudes propres à la scène allemande. La société qui dans son mouvement même est contradictoire, donc en perpétuelle rupture avec elle-même, nous est présentée comme une succession d'expériences qui permettent, qui impliquent des contre-expériences. Il faut laisser du jeu à la représentation c'est-à-dire prendre vis-à-vis d'elle ses "distances" si l'on veut respecter ses contradictions. Distance entre l'auteur et l'histoire racontée, distance entre l'histoire et l'acteur qui la retransmet, distance entre la représentation et le spectateur qui la reçoit. Il y a certes des faiblesses dans le "Petit Organon": la critique du système aristotélicien par exemple reste assez superficielle: les poètes tragiques grecs attribuaient en fait à la tragédie une importante fonction pédagogique. A côté de la catharsis, Aristote parle de l' anagnosis qui signifie reconnaissance ou plus exactement passage de l' ignorance à la connaissance par le moyen du drame.
    Mais toute la partie constructive du "Kleines Organon" révèle la fermeté de qui a fait passer ses principes au feu de l' expérience. On y trouve en particulier les plus précieuses indications concernant le style de jeu épique, que Brecht développera en 1952 dans "Une nouvelle technique de jeu du comédien". Ce style de jeu doit beaucoup à l'art de l'acteur chinois. L'acteur chinois se regarde jouer sans craindre de montrer qu'il est attentif à bien exécuter la tâche qui lui incombe. Des signes extérieurs ancestralement choisis pour chaque nuance de l' émotion ou du sentiment constituent un vocabulaire parfaitement clair. L'interprète n'est pas le héros, il le montre. L'acteur épique, plus simplement, peut prendre modèle sur la façon dont le témoin d'un accident dans la rue explique à la foule comment les choses se sont passées. La recherche de l'effet V est à la base de toutes les innovations dans ce domaine; Brecht utilise tous les procédés qui permettent à l'acteur d'apparaître sur scène comme une double figure: personnage et interprète restant distincts et sensibles dans leur dualité. Ainsi l'étude d'un rôle ne se fera jamais séparément des autres rôles. Au besoin, des acteurs échangeront leurs rôles pendant les répétitions. Nous ne pouvons ici mentionner tous les moyens, grands et petits, dont Brecht se servait pour faire travailler ses acteurs. Quant aux arts voisins de celui de l'acteur, Brecht leur a toujours accordé la plus vive attention. La musique de scène, les décors, les costumes, la chorégraphie, le mime, aucun de ces éléments n'abdique au profit des autres, ni ne se fond dans l'ensemble; chacun a son rôle propre et "leurs rapports se définissent par une aliénation mutuelle".
    Le théâtre épique refuse les mensonges de l'art, l'illusion parfaite de la vie, et "apparaît comme la seule alternative viable au théâtre d'illusion". La somme de ces recherches, dont les résultats sont éparpillés sur plusieurs années dans de nombreux articles, des études, des commentaires de mises en scène, Brecht l'a résumée et illustrée dans "Travaux de théâtre" (1951). Dans cet ouvrage collectif, réalisé par l'équipe du "Berliner Ensemble", Brecht fait le bilan de ses essais de théâtre épique et analyse les six pièces les plus représentatives qu'il a montées au cours des dernières années: "Mère courage", "Maître Puntila et son valet Matti", "La mère", "Le procès de Lucullus", "Les fusils de la mère Carrar" et "Le cercle de craie caucasien". Tout ce qui se rapporte à son théâtre y figure: mise en scène, éclairages, projections, accompagnement musical, jeu des acteurs, critiques de l'auteur. C'est un livre indispensable qui met en lumière les raisons profondes de cet art et de ses exigences, la volonté de son créateur de se tourner vers un public populaire, celui des masses, de répondre à ses désirs de l'éclairer et de provoquer en lui les réactions nécessaires de la révolte contre tout ce qui entrave son ascension et sa libération.

  • administrateur théâtres

    https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/le-chant-de-la-source

    Souvenir... un de mes premiers articles! Écrit par : deashelle | 17/08/2010

    http://www.festivaldetheatredebruxelles.be/
    Du jeudi 19 au dimanche 22 août 2010 au Parc Royal de Bruxelles 4ème édition

    Les Baladins du Miroir, théâtre forain musical et poétique, nous présentent des contes et légendes délectables : « Le chant de la source »

    L’arbre aux trésors de Henri Gougaud nous chuchote : "Non point changer la vie, mais l’aider à éclore. Voilà pourquoi sont au monde ces récits parfois millénaires qui ont atteint à la gloire insurpassable des œuvres : l’anonymat. Car je ne suis pas l’auteur de ceux qui sont dans ce livre. Je n’ai fait que les raviver, les ranimer, les restaurer, comme d’autres restaurent de vieux châteaux. J’ignore qui en sont les premiers auteurs. D’ailleurs, qu’importe ? Ils sont au monde parce qu’ils sont nécessaires, comme l’air, comme la lumière du jour, comme les arbres. "
    Et l’arbre à soleils de renchérir :"Les légendes sont ce que nous avons de plus précieux en ce monde. Elles ne sont pas une pâture puérile. Elles ne sont pas une manière d’oublier le réel, mais de le nourrir. S’insinuer tendrement en elles c’est apprendre la liberté, éprouver le bonheur parfois douloureux de vivre".
    Après des cascades de rires et une ovation générale digne de nos concours royaux de musique, le public quitte à regrets le chapiteau, ruisselant d’émotion, applaudissant encore la fanfare de bonheur des comédiens qui se sont remis à chanter et jouer sur leurs instruments de musique !.... Tous les cœurs sont à l'unisson, on a apprivoisé le murmure de la source. Ce murmure fait d’humour, de rires, de musique, de poésie, de danse, de supplément d’âme.
    Grâce à une fabuleuse distribution et une metteuse en scène divine, ces 12 contes et légendes du monde se sont emboîtés comme les pièces d’une pyramide, toujours plus stupéfiants, tendres, philosophiques, et drôles. Les costumes, pastels de ciel et de terre, semblaient moulés sur chaque personnage, et vivre, vibrants eux aussi, de tous les possibles. Et voilà entre les bribes d’histoires contées, dans une atmosphère de moyen âge doré, les chants ancestraux, polyphonies aux accents slaves, turcs, napolitains qui mobilisent l’harmonie, et c’est le silence ému dans toute la salle.
    L’universalité de ces contes qui ont traversé les âges, les contrées, les mers, sans papiers, dans l’oralité et la tradition ancestrale nous chatouille le ventre, nous met des paillettes dans les yeux et forcent notre écoute sans partage ! Les personnages bien campés dans leurs accents et leur parler parlent vrai. Sortent-elles des mille et une nuits ou des contes de Canterbury? Ces histoires racontent, la terre, la femme, la mère, l’enfant, la vie, la mort, Dieu, l’esprit, l’âme et la bonté… et plein d’autres filigranes intimes que seuls nous pouvons entendre ou percevoir. La Joie, peut-être.
    La musique, la danse et poésie virevoltent, personnifiées devant nous par enchantement et nous bercent notre essence originelle, sensible aux histoires mythiques qui ravissent le corps et l’âme. Question de chant et de source.
    Et la violoniste n’a rient dit, mais a tout dit.

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