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administrateur théâtres

 

De la grâce dans l’humain, du divin dans l’humanité !

Akademie für Alte Musik Berlin

Matthäus-Passion

René Jacobs direction - Werner Güra Evangelist (ténor) - Johannes Weisser Christus (baryton) - Sunhae Im soprano - Bernarda Fink mezzo - Topi Lehtipuu ténor - Konstantin Wolff basse - Akademie für Alte Musik Berlin , RIAS Kammerchor

Johann Sebastian Bach, Passion selon saint Matthieu, BWV 24412272826071?profile=original

Une œuvre-clé de Johann Sebastian Bach, à redécouvrir grâce à la lecture de René Jacobs. En écrivant sa partition la plus imposante, Bach nous a livré l’une des pièces les plus poignantes du répertoire, qui traite en profondeur de la souffrance humaine sous toutes ses facettes. La lecture qu’en livre René Jacobs nous permet de redécouvrir toute la portée de cette œuvre d’art éternelle.

La huitième édition du KlaraFestival s'ouvrait vendredi soir au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles avec le concert "La Passion selon Saint-Mathieu" avec René Jacobs à la tête de "Die Akademie für Alte Musik Berlin", un orchestre baroque de 30 musiciens, le "Rias Kammerchor" et un solide casting de solistes.

 

Ce premier soir du festival Klara 2012,  Knockin’ on Heaven’s Door, les portes du Paradis se sont ouvertes et on les a passées, vivants,  …  pour découvrir l’essence profonde de la musique et une esthétique inégalée. Nous avons vécu une immersion directe dans la grâce dès les premières mesures, aspirés par l’ampleur de  l’harmonie, soufflés par la tenue magistrale des artistes, le génie du chef d’orchestre et la texture pleine d’anima de la partition. On ne peut que  méditer sur la qualité extraordinaire  du travail et la densité musicale qui se développe à mesure…Pas le moindre gramme d’emphase: que du vécu intérieur, distillé et idéalisé, sonorisé. René Jacobs, à la tête de Die Akademie für Alte Musik Berlin  est  au faîte du savoir-faire : son équipe musicale  merveilleusement unie dans la diversité.  Tandis qu’au moment même, la colère et la violence grondent partout dans le monde  et  que la misère reste le lot de beaucoup d’humains, nous sommes face à une œuvre d’art vibrante.  

Et pourtant, même la salle de concert disparaît pour n’être baignée que de l’indicible « dit », chanté, résonné, claironné, célébré. Un rythme sinueux entraine les  spectateurs  et les arrête 7 fois lors des « chorals », stations du chœur qui égrène la mélodie de base, une alternance simple de six et cinq syllabes.  « Wenn ich einmal soll scheiden, so scheide nicht  von mir… » Poésie et musique inspirées se rejoignent. Surviennent les scènes dramatiques d’où coule la compassion où s’éclaircit la simplicité du mystère. Bach le dramaturge fait preuve d’une  écriture puissante et humble à la fois et  d’une fluidité philosophale… jamais égalée qui nous fait assister  dans ce concert à la ré-union des contrastes. 

Ce concert hypnotique dont on sait qu’il va finir inexorablement nous mène de plein pied dans l’infini.

La complexité musicale est à la hauteur de la complexité humaine, mais à la fois d’une limpidité éclatante. Une limpidité qui nous donne tout-à-coup le courage d’ouvrir son cœur et de s’abandonner au tissage méticuleux de l’œuvre, aux flamboyances du récitatif de l’évangéliste (Werner Güra), à la profondeur de la basse (Konstantin Wolff), au charme féerique de la soprano (Sunhae Im), au vécu féminin de la mezzo (Bernarda Fink), à la douleur et à la grandeur de Jésus dont l’âme et le corps sont en souffrance indicible. La figure du Christ était magnifiquement interprétée par Johannes Weisser. On se révolte contre la foule hagarde et aveugle, « Lass ihn kreuzigen ! ». On fond de tendresse avec le pécheur gagné par l’amour dans le magnifique récitatif Nr 57. Les récitatifs suivis d’une aria sont des petits concerts de chambre qui se suffiraient à eux-mêmes insérés comme des incrustations de bijoux dans un grand dessein.  C’est à chaque fois, une apogée de l’émotion esthétique. Bernarda Fink supplie : « Torturé, accablé sous le poids de ses remords, vois mon cœur ! Goutte à goutte que les larmes comme un pur et doux parfum sur ta tête se répandent, divin Maître. » La soprano exquise Sunhae Im continuera :  « Wiewohl mein Herz in Tränen schwimmt… » Son appel est d’une finesse extrême « Ei, so sollst du mir allein mehr als Welt und Himmel sein. » L’appel de Jésus sera déchirant, souligné plaintivement par les larmes délicates des flûtes : « Mein Vater, ist’s möglich, so gehe dieser Kelch von mir ; doch nicht wie ich will, sondern wie du willst…»    

 Et pendant les 78 sections,  on retient son souffle devant cette vivante œuvre d’art,  on ne pense à rien d’autre qu’à planer sur le sourire divin de la musique. L’idylle musicale s’achève dans des applaudissements respectueux,  délestés de barbarie, nourris d’esprit et de cœur. Jamais un concert n’a touché autant que celui-ci, de l’avis de plusieurs spectateurs qui, d’inconnu à inconnu, se  livraient leur émoi profond après le concert.

La lune bleue, c’était ce soir.  Un 31 août 2012. « O schöne Zeit ! O Abendstunde ! » Voici la paix conclue avec le ciel...

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