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administrateur théâtres

La compétition en art musical

J'aimerais soumettre à vos réflexions  un article intéressant de 

  

Compétition

Chaque année, à pareille époque, nul en Belgique ne peut ignorer qu’on vit au rythme des épreuves du Concours Reine Elisabeth, radio et télévision ouvrant abondamment leurs antennes à cette compétition – les demi-finales et la finale sont transmises en direct -.

Hier, quelques millions de téléspectateurs ont suivi la finale de l’Eurovision de la chanson… ou de The Voice France !

Pendant qu’à Liège, quelques centaines d’auditeurs bénéficiaient d’un concert de très haute volée, avec la première Symphonie de Franck dirigée par Christian Arming à Liège devant son public. Après une grandiose ouverture du Vaisseau Fantôme de Wagner et un Poème pour violon de Chausson d’un lyrisme, d’une transparence, inouïs, sous l’archet de Yossif Ivanov et la baguette du chef autrichien.

Je n’ai jamais été fan de ces compétitions dans le domaine artistique. Enfin, peut-on encore dire que l’Eurovision de la chanson ressortit à l’artistique ? Le peu que j’en ai aperçu dans le passé m’en fait vraiment douter… Il faut croire que c’est un business qui rapporte à défaut de révéler de vrais talents et de soutenir de vrais créateurs..

Je comprends ceux qui se passionnent pour le Concours Reine Elisabeth – comme on peut le faire, dans le domaine sportif, pour Roland-Garros – mais, aussi paradoxal (ou provocateur) que cela puisse paraître, une grande part d’entre eux ne le fait pas pour la musique, mais parce que c’est une course d’obstacles. M’étant trouvé à quelques reprises au milieu du public qui assiste aux épreuves, je n’ai pu que constater que ce public n’est pas du tout celui qui vient d’habitude au concert. D’ailleurs quand s’annoncent les concerts des lauréats dans les différentes villes belges, comme à Liège, on voit arriver des spectateurs… qu’on ne voit jamais pendant la saison.

Faut-il, comme Bartok, et bien d’autres, dénier à ces concours leur utilité, leur pertinence ? Pour quelques célèbres lauréats des concours Chopin de Varsovie, Tchaikovski de Moscou, Sibelius d’Helsinki, Reine Elisabeth, Genève ou Van Cliburn, combien sont passés aux oubliettes de l’histoire ou n’ont pas survécu à une gloire éphémère ? Combien de très grands artistes ont fait de magnifiques carrières… sans jamais passer par l’étape concours !

Le débat n’est pas clos… La compétition ne fait pas l’artiste, elle peut le révéler, l’aider… ou le détruire. Elle devrait aussi apprendre au public ce qu’est un authentique artiste, ses doutes, ses fêlures, ses fragilités, et non l’exhiber comme un singe savant dont on attend la “prestation” (quel terme horrible, entre nous soit dit, que celui de “prestation” pour un musicien !)

Author: Jean-Pierre Rousseau

directeur général Orchestre philharmonique royal de Liège (Belgium) directeur France-Musique (1993-1999)

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Réponses

  • Je partage l’opinion de Jean-Pierrre Rousseau. Et j’ajouterai que ce genre de compétitions apporte son lot de polémiques. Mais, me direz-vous, quoi de plus normal : le concours, dans un domaine aussi subjectif que la musique savante où l’interprétation se mêle à la technique, échauffe les esprits, entraîne des débats passionnés. Sans parler des sempiternelles discussions sur le bien-fondé du palmarès et de ce que peuvent éprouver les "compétiteurs" qui sont en effet exhibés comme des bêtes de foire promis à l’abattoir (l’élimination) avant ou après épuisement ("On achève bien les chevaux"....), c’est bien là, selon moi, que réside le nœud du problème : ces compétitions sont des machines à engendrer les bas-instincts (et du public, et des candidats). Et les phantasmes (Que se passe-t-il en coulisses ? - Y a-t-il manipulations ? - La  non-transparence de la délibération d’un jury qui, quelle que soit la procédure de notation et de décision, peut être suspecté de connivence. En effet, les membres du jury se connaissent tous et peuvent faire un renvoi d’ascenseur par (ex)élèves-candidats interposés......). La comparaison avec les télés-crochets ou plus globalement la "philosophie" de la télé-réalité me semble pertinente.

    En ce qui concerne les différents intérêts du public fréquentant les concours et sans généraliser, il me semble qu’on peut parler de snobisme. Il s’agit plus ici de "statut social" qu’un amour profond et sincère de la musique (exactement comme pour un certain public fréquentant l’opéra....)

    Alors oui, pour un jeune prodige, musicien, artiste dans l’âme et qui désire se faire un nom, la concurrence est rude. Surtout dans un domaine en crise (le marché de la musique dans lequel les concerts rapportent plus que l’édition discographique) et qui touche, qu’on le veuille ou non, un public restreint. Auparavant, il y a eu en effet nombre de musiciens classiques qui ont réussi de brillantes carrières sans passer par les concours. Mais actuellement, de par le système des agents liés au monde de la communication et des média, la plupart des jeunes prodiges se voient contraints d’en passer par les compétitions. Le show, l’exhibition à tout prix sont mis en avant. L’emballage prime sur le contenu. On peut espérer que cela ne relève que de l’effet de mode ("le phénomène de la télé-réalité") mais il en va peut-être ainsi de l’évolution de notre société. C’est un autre débat.

     

     

  • Bien d'accord avec cet avis, sincère et lucide.  Le concours est, pour moi, l'occasion d'entendre de la merveilleuse musique, interprétée par les meilleurs musiciens du moment ( et je ne parle pas seulement des solistes !).  Je me suis d'ailleurs toujours demandé comment font les membres du jury pour départager des artistes d'un tel niveau et  c'est , pour moi, un des aspects négatifs de ces compétitions.  Quant à l'Eurovision.......parlons d'autre chose !!!!!

  • administrateur théâtres

    Boris Giltburg fâché avec les concours, un article publié par  Xavier Flament en juin dernier

    Boris Giltburg a remporté le Reine Elisabeth il y a trois semaines. Ce lundi 24 juin, il a raconté à Barbara Lewis, la correspondante à Bruxelles de l’agence Reuters, les dessous de son expérience et à quel point sa colère ne s’apaise pas contre le système des concours. Il rapporte ainsi qu’aux demi-finales, il a cru perdre ses moyens après son trou de mémoire, au milieu de son concerto de Mozart. Sa mère et sa grand-mère, toutes deux pianistes sont sorties de la salle avec la conviction que c’était fichu, comme lui d’ailleurs.

    Boris Giltburg reçoit son premier prix. Une victoire qui n'efface pas la souffrance de l'épreuve. (c) DR

    Boris Giltburg reçoit son premier prix. Une victoire qui n’efface pas la souffrance de l’épreuve. (c) DR

    « Ce que je désirais le plus, c’était m’enfuir, mais je savais que je ne pouvais pas », a-t-il déclaré. Après la performance, il s’est forcé à écouter l’enregistrement de la séance, constatant que contrairement à ses attentes, il ne s’était en fait pas arrêté de jouer. Sa main droite avait continué à jouer « quelque chose ». Il s’est même senti meilleur, plus relâché et fluide après ce trou de mémoire. Giltburg s’est malgré tout déclaré incrédule d’avoir été retenu pour la finale et pour le nouvelle épreuve, présentée par Reuters comme une « semaine de confinement » à la Chapelle musicale Reine Elisabeth.

    Partagé entre la colère et le désespoir, Giltburg dit avoir vécu là les semaines les plus dures de son existence et que sa colère ne s’est toujours pas apaisée. « Je suis un peu fâché contre ce monde qui ne propose pas d’autres voies que les concours pour découvrir le talent. » Il souhaite en tout cas ne jamais faire partie d’un jury ni de participer à ce genre de décision qui détermine le futur d’un individu. Mais, en même temps, il exprime sa gratitude envers les jurés de l’avoir choisi, les sachant eux-mêmes suffisamment expérimentés pour savoir que même un excellent pianiste peut oublier quelques notes.

    Pour l’avenir, il affirme en tout cas qu’il n’y aura plus de concours, seulement des concerts, ce qu’il dit adorer. « C’est ce qui me tire le plus. Il arrive un moment où vous ne pouvez plus avancer sans vous produire devant un public. C’est la seule chose vraie ; ce que l’on ne peut pas simuler. » C’est dit. (d’après Reuters, traduction X.F.)

  • administrateur théâtres

    Michel-Etienne Van Neste explique comment des rendez-vous avec les organisateurs de  concerts  sont déjà pris avant le Concours 

    Interview de Michel-Etienne Van Neste, Secrétaire du Concours

    La résonance internationale du Concours

    http://www.rtbf.be/video/detail_interview-de-michel-etienne-van-nes...

  • administrateur littératures

    En faudrait-il bannir tous les concours de cet ordre? Où il est uniquement - ou presque - question de performance? On peut craquer subitement, en cause la fatigue, la pression ou le stress, et être un interprète de génie malgré tout, malheureusement sanctionné à cause d'un la bémol par exemple. Heureusement, il existe un prix des auditeurs mais c'est insuffisant: il faudrait un classement "public" des 24 lauréats car, selon moi, une fois parvenus au stade de la demi-finale, ils méritent tous une médaille. Merci, Deashelle, pour cette publication sensée et pertinente.

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